La différence qui fait la différence, autisme au travail

L’autisme en milieu de travail

Comprendre une différence que l’on ne voit pas s’avère toujours plus difficile. C’est le cas, entre autres, avec les neurodivergences, dont l’autisme fait partie. Or, dans une démarche d’équité, de diversité et d’inclusion (EDI), il importe de porter un regard sur tous les groupes marginalisés et de mieux comprendre les réalités associées.

 

La diversité et l’inclusion n’est pas une tendance qui s’épuisera avec le temps. C’est un enjeu social envers lequel votre organisation choisira de s’engager, tôt ou tard. En effet, que ce soit la rareté de la main d’œuvre, des obligations légales relatives à la taille de votre entreprise ou encore votre clientèle qui vous demande de vous confirmer à certains critères en ESG (environnemental, social et gouvernance), vous avez tout à gagner à vous préoccuper dès à présenté de l’EDI.

 

« La diversité, c’est de compter les têtes; l’inclusion, c’est faire en sorte que les têtes comptent » – Winters

 

Cet article vous propose un regard sur l’autisme en milieu de travail sous le regard de l’inclusion auprès de personnes autistes de niveau 1. Il ne sera donc pas question ici des initiatives de soutien à l’emploi issus de pratiques de ségrégation ou d’intégration, comme les ateliers protégés, les groupes de travail, etc. Le Centre intégré de santé et services sociaux de votre région peut vous renseigner sur les services offerts à cet effet.

 

 

L’autisme en milieu de travail : définition et chiffres clés

Qu’est-ce que l’autisme?

La Fédération québécoise de l’autisme propose cette définition :

Le trouble du spectre de l’autisme (TSA) fait partie de l’ensemble des troubles neurodéveloppementaux décrit dans le DSM-V (manuel diagnostique et statistiques des troubles mentaux, 5e édition). Le TSA se caractérise par des difficultés importantes dans deux domaines :

  • La communication et les interactions sociales : Communication non-verbale inadaptée, répétitions de certains mots ou expressions, difficulté à exprimer ses émotions et à comprendre celles d’autrui, peu de contacts oculaires, difficultés à engager une conversation, etc.
  • Les comportements, activités ou intérêts spécifiques : Mouvements répétitifs ou compulsifs, intolérance aux changements ou à l’imprévu et mise en place de routines, intérêts ou activités obsessionnelles, hyper ou hypo sensibilité aux stimulations sensorielles, etc.

 

Le profil autistique est catégorisé en trois niveaux lors du diagnostic :

  • Niveau 1 : qui requiert un soutien (on y retrouve souvent l’Asperger, qui, depuis 2013, est inclut dans le diagnostic de TSA)
  • Niveau 2 : qui requiert un soutien important
  • Niveau 3 : qui requiert un soutien très important.

Autisme et emploi, en quelques chiffres

Les études ont démontré que les femmes dissimulent davantage leur TSA, notamment en fonction des pressions sociales liées au genre. Ce faisant, elles présentent des signes moins visibles ou connus de l’autisme, entre autres par une forte tendance à imiter les comportements sociaux observés, un comportement nommé « camouflage social ». Elles sont donc sous diagnostiquées et le sont tardivement.

 

Ceci étant dit, on constate une augmentation de la prévalence au sein de la population. Cette augmentation s’explique, entre autres, par une plus grande précision des critères diagnostiques, une meilleure connaissance du profil féminin de l’autisme et le dépistage qui se fait à un âge plus précoce, souvent avant l’entrée à la maternelle.

 

Les données statistiques ne sont pas toujours différenciées en fonction de l’âge (enfants ou adultes) ou encore avec ou sans déficience intellectuelle associée. Également, les données spécifiques concernant les personnes autistes et l’emploi manquent à l’heure actuelle. Néanmoins, l’autisme est inclus, tout comme d’autres troubles, dans la catégorie incapacité de type développementale qui elle, est documentée. Néanmoins, voici quelques chiffres sur l’autisme :

  • Taux de prévalence estimé : 2 % de la population
  • 80 % des personnes autistes ont un revenu annuel sous le seuil de la pauvreté, comparativement à 16 % dans la population québécoise;
  • Le taux d’emploi des personnes ayant une incapacité de type développemental est de 16,3% comparativement à 42 % pour les autres incapacités et 72,4 % sans incapacité;
  • Parmi les personnes travaillant à temps plein, seuls 53 % le font dans un emploi en lien avec le domaine d’études;
  • 49 % des personnes autistes rapportent avoir du mal à faire valoir leurs compétences dans leur emploi;
  • 47 % sont mal à l’aise en entrevue;
  • Les environnements non adaptés ont été soulevés comme obstacle pour l’obtention et le maintien d’un emploi (53 %) et pour la satisfaction en emploi (28 %);
  • Dans une étude qualitative, 25 % ont rapporté avoir vécu de l’exclusion dans le milieu de travail.

Les avantages de l’emploi des personnes autistes

Le sous-emploi est malheureusement une problématique endémique chez les personnes autistes. Et pourtant, on gagne tous et toutes à normaliser la neurodiversité et à accueillir les différentes façons de penser, de socialiser, de ressentir et d’apprendre.

 

Bien que chaque personne ait des caractéristiques et des manifestations qui lui sont propre et sa façon de vivre son autisme, la recherche documente plusieurs qualités intéressantes.

Les compétences et les talents des personnes autistes :

  • Grande fiabilité;
  • Suivi des procédures et des règles de façon exacte;
  • Grande attention aux détails;
  • Grande tolérance au travail répétitif;
  • Persistance, précision et souci du détail;
  • Taux d’absentéisme plus faible que les autres employé·es.

 

La diversité est une force pour les équipes de travail. Inconsciemment, nous cherchons à nous rassembler selon des points de ressemblance alors que la productivité d’une équipe est étroitement reliée à la différence et la complémentarité des membres qui la composent.

Les avantages pour l’entreprise et l’équipe de travail :

  • Une façon différente d’aborder la résolution de problème;
  • Un accomplissement du travail de façon inédite;
  • Une amélioration des performances au sein de l’équipe;
  • Une expertise poussée sur des sujets spécifiques;
  • Une aptitude à se concentrer profondément sur une seule tâche;
  • Une meilleure détection des erreurs et omissions;
  • Une prise de décision plus objectives;
  • Une augmentation de la qualité des produits et/ou services.

 

« The world needs different kinds of minds to work together. » – Temple Gradin

Les défis rencontrés par les personnes autistes

Différents obstacles se présentent sur la route de l’employabilité pour les personnes autistes, même avec un haut niveau de fonctionnement. Pourtant, assigné·es dans le bon rôle, il s’agit de talents dont on ne voudrait pas se passer. Ces obstacles se déroulent tant dans la portion recrutement qu’en cours d’emploi.

 

Le processus d’entrevue repose grandement sur les habiletés sociales, ce qui ne leur permet pas de commencer le processus sur le même pied d’égalité qu’une personne neurotypique. En entrevue, gardez en tête que vous souhaitez évaluer les compétences reliées au poste, et non les compétences sociales. Celles-ci s’amélioreront naturellement avec le temps dans un milieu de travail bienveillant.

Les obstacles à l’embauche et à l’intégration :

  • S’inquiéter du déroulement de l’entrevue;
  • Comprendre les signes sociaux, le langage corporel, le contact visuel approprié;
  • Être surstimulé par un nouvel environnement et donc vivre plus d’anxiété face à la nouveauté;
  • Choisir le ton de voix adéquat et le niveau de formalité attendu;
  • Savoir pondérer la quantité d’information à livrer pour répondre à une question;
  • Faire preuve d’une grande modestie face à ses connaissances et compétences;
  • Avoir de la difficulté avec les questions d’entrevues ouvertes ou hypothétiques.

 

Le quotidien au travail est également source d’embûches. Dans certains cas, des adaptations peuvent s’avérer nécessaires afin de permettre à la personne d’atteindre son plein potentiel dans son rôle.

Les difficultés rencontrées au quotidien :

  • Porter attention sur des détails que le cerveau typique peut tendre à éviter et, conséquemment, être moins bien compris par l’équipe;
  • Avoir des idées pertinentes, mais de la difficulté à savoir quand ou comment les partager;
  • Être centré sur les faits, plutôt que les émotions;
  • Prendre les choses au premier degré;
  • Vivre des défis d’adaptation au changement;
  • Avoir rythme d’apprentissage différent;
  • Évoluer plus difficilement dans un milieu où les consignes sont floues;
  • Avoir besoin de moments de calme et de solitude;
  • Être trop direct (manque de tact);
  • Difficulté à travailler en groupe;
  • Avoir de la difficulté à s’intégrer aux conversations, avec le small talk.

 

Les pratiques d’employeurs inclusifs pour l’emploi de personnes autistes

Concrètement, quelles mesures pouvez-vous adopter afin d’offrir un environnement plus inclusif pour les travailleurs·euses autistes?

  • Développez une culture organisationnelle qui encourage la diversité et la divulgation d’un handicap;
  • Révisez vos pratiques de recrutement et d’entrevue;
  • Osez créer un horaire adapté aux besoins et aux préférences;
  • Formez vos gestionnaires et vos employé·es sur les biais cognitifs;
  • Formez vos talents à la prévention du harcèlement psychologique, sexuel et discriminatoire ainsi qu’à la civilité en milieu de travail. C’est d’ailleurs une bonne pratique de tenir annuellement une telle formation, pour tous vos employées;
  • En tant que gestionnaire, exprimez clairement vos attentes et vos priorités;
  • Prévoyez des pauses plus fréquentes les premiers jours pour aider la personne à gérer son stress ou réduire les stimulis;
  • Communiquez les réunions à l’avance, les sujets traités et permettre à l’employé·e de contribuer par écrit;
  • Jumelez votre recru·e avec un·e employé·e informé·e du plan d’accueil personnalisé et qui pourra faciliter son intégration. Veillez à ce que la personne relève d’un·e seul·e gestionnaire;
  • Soyez clair et concis dans vos demandes. Évitez « fais comme tu le juges bon », « ne te pose pas trop de questions », de même que les termes flous (environ, un peu, beaucoup);
  • Privilégiez la communication écrite pour un premier partage d’information;
  • Acceptez ses rétroactions parfois directes, car il lui est difficile d’exprimer sa pensée de façon nuancée;
  • Inversement, soyez nuancé pour formuler des critiques et généreux en encouragements;
  • Respectez ses besoins de calme sans interaction;
  • Adoptez une posture de bienveillance et de non-jugement.

 

Conclusion

Les attentes et idées préconçues des employeurs peuvent rendre difficile l’employabilité des personnes autistes. Pourtant, ces talents ont de nombreuses forces à offrir dans une organisation.

 

Le dialogue et l’ouverture vous permettront de demeurer conscientisé·e aux besoins particuliers des personnes autistes et vous pourrez facilement apporter les adaptations simples mais oh combien aidantes. Personnalisez l’expérience employé·e comme vous le feriez pour votre clientèle! Vous contribuerez ainsi à une meilleure inclusion et, qui sait, déjouer les statistiques

 

Et si la différence qui ferait toute la différence dans votre entreprise dans cette guerre des talents que nous vivons actuellement se cachait derrière une meilleure inclusion?

 

Envie d’opter pour une vision inclusive de vos RH? Prenons rendez-vous pour en discuter.

 

Références :

https://www.autisme.qc.ca/comprendre/quest-ce-que-le-tsa.html

https://www.autisme.qc.ca/assets/files/07-boite-outils/Outils-Ressources/Guide-insertion-Emploi-Asperger.pdf

https://cahs-acss.ca/wp-content/uploads/2022/04/ACSS-Lautisme-au-Canada-Reflexions-pour-lelaboration-de-futures-politiques-publiques.pdf

https://frq.gouv.qc.ca/app/uploads/2021/04/spectre-autisme_melanie.couture-rapport.pdf

https://www.inspq.qc.ca/publications/2310

https://www.rnetsa.ca/fr/centre-de-documentation/172/autisme-et-emploi-accessibilite-et-inclusion

Image par Freepik

 

 

 

Et si repenser la gestion des ressources humaines était la clé pour mobiliser vos talents au sein d’une culture d’entreprise forte et humaine?

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